Zuydcoote: Zone de loisirs
N° du site : 59 668 001 AH
L'année 1995 est celle de la dernière
intervention sur le site, en tout cas sous la forme actuelle.
La zone qui sera aménagée au début 1996
n'a pas été reconnue en totalité mais une
surface de 500 m2 environ a été fouillée
sur 3,50m de statigraphie. Il s'agit pour l'instant de la seule
recherche menée sur le littoral de la Flandre française
d'un aménagement de ce type pour le XIIIème siècle.
Les résultats obtenus sont importants puisqu'ils correspondent
à une première occupation. Les arrivants s'installent
sur un sable gris, gorgé d'eau encore actuellement, non
sur une éminence mais sur une partie relativement plate,
découverte par la mer (Shorre). Cela nécessite
un travail préliminaire de mise en forme du terrain, attesté
par la présence de drain dans le sable pissart selon un
sondage d'Octobre 1991. Après cette phase assez difficile
à cerner et une couverture sableuse de dépôt
éolien, un fossé au profil particulier apparaît,
très large avec un recreusement central vaguement triangulaire.
Sa forme particulière, peut-être un collecteur,
est due à la fluidité du sable déposé
par la mer dont la tenue est nulle au fur et à mesure
qu'il se gorge d'eau.
En relation avec ce fossé, une seconde phase d'occupation
apparaît, plus importante, avec présence de murets
en briques, sols d'occupation, etc. Sa fin voit l'aménagement
d'une structure particulière, indéfinissable actuellement.
Il s'agit d'une rigole d'écoulement dont la paroi sud
est en argile et qui a pour paroi nord quatre planches d'une
bordée de bateau en construction à clin de la fin
du XIIème siècle- début du XIVème
siècle. L'ensemble mesure 7,50m avec de part et d'autre
une grande plate-forme en argile de 0,20 à 0,30m d'épaisseur.
Il s'agit sans doute d'un aménagement de type artisanal,
sans que son but soit apparent. Une maison, sur bases de murets
en briques avec sol en réchapage d'argile et toit en tuiles,
sépare ce dispositif du fossé est.
Le tout est recouvert d'un niveau de destruction puis d'un second
dépôt de sable de type éolien. Une autre
plate-forme est réaménagée à l'emplacement
de la première, sans caniveau central cette fois. Associé
à cette occupation, un second habitat nettement cerné
s'ouvre contre le fossé sur lequel il déborde d'ailleurs
comme en témoigne la réduction de la largeur du
fossé encore en activité. Il s'agit du type même
de construction que dans le premier cas, avec un auvent orienté
à l'ouest au-delà du mur. De cette installation
subsistent des sol, trous de poteaux et foyers en briques. L'ensemble
est démoli de façon violente, comme l'atteste un
niveau de destruction retrouvé sur les vestiges.
Un nouveau dépôt de sable de type éolien
recouvre le site de façon plus importante. Toute la partie
ouest est ensuite recreusée par une fosse de 15 X 5m.
Peu profonde, elle sert de dépotoir, comme le montrent
les débris alimentaires variés qui y sont découverts
et les nombreux nodules de métal rouillé. Le fossé
oriental est comblé et de nombreuses lentilles intercalées
dans les lits de sable s'accumulant sur ce qui semble être
à la fois une zone de rejet diffuse et un endroit où
stagne au moins épisodiquement de l'eau, conséquence
probable de la présence du fossé sous ces niveau.
Cet état est présent sur la surface de tout le
chantier, reconnue par des explorations depuis 1991.
La présence de quelques fosses, en général
vide de matériel, ponctue le sol. L'une d'elle contient
cependant une grande quantité de rejets de foyer et des
nodules métalliques ce qui renforce l'idée d'une
activité particulière déjà pressentie
avec la fosse dépotoir nord.
Après un nouveau niveau d'abandon composé de sable,
l'habitat se concentre au sud de la zone de recherche par trois
structures superposées dont la plus ancienne est construite
sur sablière en bois, une deuxième sur bricaillons
de récupération et la dernière sur sablières
et poteaux avec sol en argile. Toute la zone nord voit une accumulation
lente du sable dans laquelle s'intercalent épisodiquement
des niveaux de sol de stabilisation en formation.
Un découpage chronologique permet de visualiser une occupation
dense dès l'origine vers la fin du XIIIème siècle
ou au début du XIVème siècle, avec un double
renouvellement des structures extrêmement rapide en réutilisant
les mêmes emplacements, par rapport au fossé est
par exemple ou à l'aménagement en plate-forme et
caniveau. Le matériel est quasiment contemporain pour
l'ensemble de cette phase. Les occupations ultérieures
semblent, en tout cas pour la zone explorée, moins importantes
et moins riches. Le derniers habitat du milieu du XVème
siècle, ce qui correspond aux troubles qui font disparaître
plusieurs sites le long du littoral à cette époque.
Les fouilles de Zuydcoote représentent une chance inespérée
d'étudier l'implantation volontaire et organisée
de villages sur la côte du XIIème au XIVème
siècle, d'autant plus qu'il est possible d'envisager des
comparaisons avec les sites belges et celui de Loon-Plage sondé
cette année. Il est nécessaire d'envisager une
nouvelle exploration dans les années à venir, sous
une autre forme que le sauvetage et peut-être dans une
zone différente puisque les prospections ont révélé
une surface d'occupation d'environ 20 ha.
Yves
Beauchamp, Thierry Marck.GRAAL |